Napoléon dans les programmes d’histoire

Tribune


« À la rentrée, les élèves vont découvrir un peu mieux Napoléon. » ; c’est sur cette phrase de Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon, que vient de titrer le 15 août dernier le site du Point[1] , dans un article consacré au deux-cent cinquantième anniversaire de la naissance de l’empereur des Français. Il est vrai, comme le résume Lentz, que, à partir de l’année scolaire prochaine, la figure de Napoléon Ier (1769- 1821) et la période historique du Consulat et de l’Empire[2], bénéficieront d’un traitement sensiblement plus important que par le passé dans les manuels scolaires d’histoire-géographie. Cela ne sera pas difficile : ni l’empereur, ni l’Empire, n’étaient plus présents dans ces manuels. Ce retour de la figure et de l’histoire napoléoniennes sont-ils toutefois suffisants ?

Passée la satisfaction immédiate, qu’il soit permis d’en douter. La décision du ministre de l’Éducation Nationale, Jean-Michel Blanquer, si elle opère une notable inflexion par rapport au dogmatisme habituel du Conseil supérieur des programmes (CSP), ressemble davantage à un « marqueur de droite », destiné à un électorat donné, à un moment électoral donné, qu’à une mesure qui en appellerait d’autres du même type, au profit d’un retour du récit national et d’une histoire plus événementielle que thématique. Une douzaine d’heures d’enseignements sur le thème « La Révolution française et l’Empire : une nouvelle conception de la Nation » est certes bien « un rayon de soleil » dans la grisaille pédagogiste, pour paraphraser Lentz, mais elle n’empêche pas que l’Histoire de France en général et la période révolutionnaire en particulier demeurent, dans les programmes scolaires, abordées par le prisme d’une vision préférentiellement de gauche.

Le bon sens doit écarter toute approche idéologique de l’Histoire dans les manuels scolaires. Il convient, selon la formule clémenciste consacrée, de prendre l’Histoire comme « un bloc dont on ne peut rien distraire », et à défaut de tout pouvoir traiter en quelques dizaines d’heures annuelles, tout pouvoir traiter chronologiquement et sommairement du principal de notre histoire, sans ni s’attarder sur des faits de micro-histoire, ni s’hasarder à des jugements de valeurs rétrospectifs. Un Napoléon Ier pris pour ce qu’il est, Premier consul puis empereur, notamment initiateur du Code civil, et non plus pour un « despote », un « esclavagiste » ou un « réactionnaire » doit participer de cette approche.

Le retour de Napoléon doit par ailleurs en appeler d’autres (Hugues Capet, Saint Louis, Philippe Le Bel, Louis XIV, De Gaulle…) afin de créer un récit national cohérent, chronologique, donc intelligible. Le Forum École & Nation se fait le porte-parole de cette approche rationnelle de l’Histoire de France dans l’enseignement secondaire.

Au reste, et pour conclure, l’article du Point dit beaucoup du rapport hésitant des enseignants d’histoire actuels à une figure comme Napoléon. Lentz prend en effet soin de préciser que beaucoup d’entre eux « n’ont guère eu de cours lors de leurs études sur le Consulat et l’Empire ». Prudemment, la Fondation Napoléon vient donc de mettre en ligne des outils numériques leur étant spécialement dédiés. Cela en dit long sur l’époque, entre le « Napoléon honteux » des uns et le « Napoléon absent » des autres…


[1] Lien de l’article : https://www.lepoint.fr/histoire/thierry-lentz-les-elites-ont-souvent-le-napoleon-honteux-15-08-2019- 2329965_1615.php
[2] Celle-ci s’étend de 1799 à 1815.

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